Interview de Ramata Kapo – Présidente de l’association « Excision, parlons en ! »

Bonjour Ramata. Peux-tu nous dire en quelques mots qui tu es ? Comment te décrirais tu ? 

Je suis française d’origine malienne, très attachée à ma double culture. Une femme battante qui milite sur toutes les questions liées aux violences faites aux femmes, plus particulièrement sur les Mutilations Sexuelles Féminines (MSF), communément appelées excisions, qui désignent l’ablation totale ou partielle des organes génitaux féminins extérieurs.

Depuis combien de temps travailles-tu sur le sujet de l’excision ? 

Depuis 13 ans. Etant directement concernée par cette mutilation, j’ai toujours voulu m’engager pour y mettre fin car ces conséquences sur la vie des femmes sont désastreuses. J’ai de ce fait, mobilisée des amies à moi partantes pour me suivre pour fonder en 2008 une association qui avait pour objectif de permettre à des femmes ayant subies une MSF de se retrouver et de partager leurs histoires. Car pour moi la parole est une des premières armes contre cette pratique.

En 2016, j’ai rejoint l’association « Excision, parlons-en! » en tant que bénévole. Ma mission principale était de mettre en place des ateliers de sensibilisation dans les établissements scolaires pour des adolescents de 13 à 18 ans autour des Mutilations Sexuelles Féminines. J’ai ensuite intégré le conseil d’administration en 2019 en tant que secrétaire, puis j’ai été élue présidente en juin dernier.

Depuis 2017, nous lançons annuellement en plus des ateliers une campagne intitulée « Alerte excision » pour briser les tabous et alerter sur les conséquences néfastes des MSF. Le but étant de protéger les jeunes filles résidant en France de l’excision, cette campagne est diffusée essentiellement sur les réseaux sociaux (facebook, twitter et instagram) mais également à travers des panneaux d’affichages dans les villes et des expositions.

Pourquoi est-il particulièrement important selon toi d’alerter les jeunes ? 

C’est essentiel d’alerter les jeunes sur l’excision car ce sont les premiers concernés. C’est important qu’ils aient conscience que cette pratique existe toujours et qu’elle est encore présente dans plus de 92 pays.

Dans le monde, une fille est excisée toutes les 10 secondes, ce qui fait 3 millions par an. Au total, l’excision touche 200 millions de filles et de femmes dans le monde, dont environ 125 000 en France.

Selon moi, il est essentiel que les jeunes s’engagent en faveur de l’abandon des MSF, car ils ont un pouvoir de persuasion indéniable. Ils seront être de bons ambassadeurs et pourront convaincre leurs ainés que cette pratique n’a aucune conséquence positive sur la femme bien au contraire.

As tu l’impression qu’avec les années, une prise de conscience générale s’effectue ou que la parole se libère au sujet de l’excision ?

La pratique des MSF perdure malgré tous les outils mis en place par les institutions et les associations.   Néanmoins on peut constater qu’une prise de conscience générale s’effectue et la parole se libère de plus en plus au sujet de l’excision.

L’enjeu pour moi aujourd’hui est de faire en sorte de changer le regard sur l’excision. En effet il faut continuer à dénoncer cette pratique, en veillant de ne pas stigmatiser les populations qui la pratique et ne pas cantonner les femmes à un rôle de victime, car elles sont bien plus que cela.

Pour moi ce sont des battantes, et c’est important de mettre en valeur le parcours de ces femmes qui on fait preuve de courage et qui ont su tout mettre en œuvre pour dépasser ce qu’elles ont vécu, certaines bravent des obstacles, pour éviter à leur fille de vivre ce qu’elles ont vécu.